- Est-ce que j'ai été sage aujourd'hui maman?

- Très sage même! Tu vas avoir 10 bons points! Tu es une gentille fille Lucina!

10 bons points. Lucina en avait déjà plusieurs vingtaines. Mais en avoir 10 de plus lui fit esquisser un sourire. Lucina n'allait pas à l'école. S'instruire ne lui apporterais pas grand chose, et surtout, elle s'en fichais éperdument. Tous les jours, elle devait rester à la maison, enfin ce qui leur servait de maison, et elle ne devait pas sortir. Elle devait être une gentille fille. Et si elle était gentille et obéissante, elle gagnait des bons points. Et quand elle gagnait des bons points, sa maman lui rapportais de quoi manger. C'était rouge, mou, mais délicieux. Le seul plat qu'elle n'ai jamais apprécié. Du moins aujourd'hui.

*****

Lucina était petite, frêle et timide. Les autres gens la regardaient de travers, elle et sa peau trop blanche aux allures de poupées, son air fragile, innocent et candide. Ses parents étaient presque aussi blancs qu'elle, un blanc comparable à un linge mais leurs yeux bleu azures. Un si joli bleu. Alors pourquoi a t-il fallu qu'elle ai les yeux rouges? Rouge comme le sang et la mort, contrastant avec sa chevelure et sa peau blanche. Pourquoi? Pourquoi les autres se moquaient d'elle? Pourquoi la regardait-on de travers?
Lucina ne savait pas, elle ne voulait pas savoir. Elle restait dans sa chambre, les mains sur les oreilles en mettant le gramophone très fort pour ne rien entendre. Ni ses parents se disputer, ni les autre gens dire des choses méchantes sur elle. À moins que cela ne soit que son imagination qui lui joue des tours? Qu'elle suppose que les gens se moquaient d'elle comme elle l'aurait fait à leur place?…
Et un jour, elle est arrivée.
Elle faisait peur, elle était grande et son allure était douteuse. Était-elle humaine? Sûrement pas. Elle poussa la porte de sa chambre, avec un petit, tout petit grincement. Elle se glissa derrière la petite fille, en baissant progressivement le son du gramophone. Aucun bruit, aucun cri, juste le pas lent de ses pieds sur le sol. Lucina se retourna, le regard apeuré, dans le vide. La femme, si c'en était une lui tendis un petit morceau rouge, ensanglanté encore tout chaud dans sa main.

- Toi et moi, on est pareilles. Mais toi, tu es une gentille fille. Tu as l'air faible. Mange donc un peu…

Lucina pris le petit bout de viande. Elle le renifla, puis le mangea par petit bouts. Avant de l'engloutir en entier. Le goût ne lui était pas familier. C'était à la fois doux et amer, acide avec des petites touches d'agriété. Ses papilles gustatives étaient comme en fête, comme si tout le mal s'effaçait d'un coup. Ce premier petit morceau de chair était, sans qu'elle ne le sache encore, le premier des milliers d'autres qui suivrons.

- Qui es-tu?

- Qui tu veux, Lucina.

Et c'est comme ça qu'elle l'a appelée "Maman" pour la première fois, sans savoir qu'elle avait mangée la vraie d'une traite. Sa "Maman" l'éleva seule, elle lui appris à chasser, à manger correctement et à se battre. Lucina eu d'ailleurs une histoire d'amour avec tout ce qui sont les armes blanches, tels les couteaux qui sont cachés dans sa chemise. Sa Maman la rendit plus forte. Elle ne l'entraîna pas, non c'était bien trop long. Elle lui offrit des organes. Plus fort, et plus puissants, pour qu'à son tour, Lucina puisse protéger sa mère. Sa mère l'ouvrait et la refermait avec toujours la même bobine de fil rouge. Mais Lucina ne souffrait pas. C'était une récompense, dû à tous ses efforts qu'elle faisait pour être une gentille fille. Sa mémoire vacillait au fur et à mesure du temps qu'elle passait avec elle, si bien qu'elle en oublia son nom de famille. C'est comme ça que Lucina devint Tout-court.

*****

- Tu seras bien sage à la maison hein? Tu n'ouvre la porte à personne et tu la referme bien quand tu sors. Je te promet de revenir.

Pour l'une des premières fois, sa Maman eut une pointe de mélancolie dans la voix. Elle reviendrait, Lucina en était sûre. Car Maman avait promis. Mais Lucina avait faim, de plus en plus faim, si bien que trouver de quoi se nourrir devint l'une de ses priorités. Elle se promenait dans les cimetières, en quête de nourriture, aussi délicieuse pouvait-elle l'être. Mais l'accès était très limité.
Donc elle postula pour y travailler. Elle avait un maître, un homme vieux, rabougri mais bien bâti à la fois. Il s'est montré d'une nature très douce avec elle, a même essayé de lui apprendre le sens moral. Il était délicieux. Mais Lucina a trouvé dommage qu'il meure aussi vite. Un pied qui glisse et KABEWM au pied d'une falaise. Il était savoureux. Les hommes sont vraiment trop fragiles.
Elle continua de travailler pourtant, même si c'était dur, car sa force laissait à désirer, la récompense était toujours la même. Aussi délicieuse soit-elle…
Mais Lucina se garde toujours de rentrer trop tard, on ne sait jamais quand elle rentrera. Car elle rentrera à la maison. Un jour…